vendredi 17 décembre 2010

La mort rose -- André Breton


Les pieuvres ailées guideront une dernière fois la barque dont les voiles sont faites de ce seul jour heure par heure
C'est la veillée unique après quoi tu sentiras monter dans tes cheveux le soleil blanc et noir
Des cachots suintera une liqueur plus forte que la mort
Quand on la contemple du haut d'un précipice
Les comètes s'appuieront tendrement aux forêts avant de les foudroyer
Et tout passera dans l'amour invincible
Si jamais le motif des fleuves disparaît
Avant qu'il fasse complètement nuit tu observeras
La grande pause de l'argent
Sur un pêcher en fleur apparaîtront les mains
Qui écrivirent ces vers et qui seront des fuseaux d'argent
Elles aussi et aussi des hirondelles d'argent sur le métier de la pluie
Tu verras l'horizon s'entrouvrir et c'en sera fini tout à coup du baiser de l'espace
Mais la peur n'existera déjà plus et les carreaux du ciel et de la mer
Voleront au vent plus fort que nous
Que ferai-je du tremblement de ta voix
Souris valseuse autour du seul lustre qui ne tombera pas
Treuil du temps
Je monterai les cœurs des hommes
Pour une suprême lapidation
Ma faim tournoiera comme un diamant trop taillé
Elle nattera les cheveux de son enfant le feu
Silence et vie
Mais les noms des amants seront oubliés
Comme l'adonide goutte de sang
Dans la lumière folle
Demain tu mentiras à ta propre jeunesse
A ta grande jeunesse luciole
Les échos mouleront seuls tous ces lieux qui furent
Et dans l'infinie végétation transparente
Tu te promèneras avec la vitesse
Qui commande aux bêtes des bois
Mon épave peut-être tu t'y égratigneras
Sans la voir comme on se jette sur une arme flottante
C'est que j'appartiendrai au vide semblable aux marches
D'un escalier dont le mouvement s'appelle bien en peine
A toi les parfums dès lors les parfums défendus
L'angélique
Sous la mousse creuse et sous tes pas qui n'en sont pas
Mes rêves seront formels et vains comme le bruit de paupières de l'eau dans l'ombre
Je m'introduirai dans les tiens pour y sonder la profondeur de tes larmes
Mes appels te laisseront doucement incertaine
Et dans le train fait de tortues de glace
Tu n'auras pas à tirer le signal d'alarme
Tu arriveras seule sur cette plage perdue
Où une étoile descendra sur tes bagages de sable

(in Le revolver à cheveux blancs, 1932)

(à écouter ici)




Peter Christopherson a rejoint John Balance le 25 Novembre dernier.

Difficile de parler de Coil ; ce pan de la musique m'est longtemps resté obscur, trop arty pour les fureurs du hardcore, pas assez pour les scènes jazz/impro ? Sans doute, quelque chose comme cela.
C'est pourtant via la scène impro que la connection s'est faite, via Un Drame Musical Instantané dont la discographie croisa celle de Nurse with Wound dans les années 80 (sur New European Recordings, bien sûr). De là, Current 93, Coil, Psychic TV et tout au fond la figure tutélaire de Throbbing Gristle ... tout un angle mort qui apparaissait, qui rouvrait à son tour sur des zones plus connues (Z'ev, Boyd Rice, Monte Cazazza ... là, c'est la scène HC de San Francisco qui faisait passerelle) et sur un domaine immense allant de ... Psychic Warriors of Gaïa à Death In June ?
C'est à Coil que je dois un des plus beaux concerts auquel j'ai pu assister (à Nantes, Oblique Lu Nights, je n'ai plus l'année en tête). Orgie sonore et catharsis industrielle : Higher beings command their powers to the ground prévenait l'écran en fond de scène durant l'intro.

Ecouter Coilectif, hommage collectif en forme de remixes sorti sur Rotorelief en 2006 ; fidèle et différent, impeccable, presque trop... y manque ce morceau raté/bancal qui sur chaque disque de Coil annonçait un peu le suivant !